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Article écrit par Flavie Widmaier, le 27 juin 2020

Comble ou fenêtre, il faut choisir !

En cette période de déconfinement où tout réaccélère et le rythme revient à la normale à l’anormal, rappelons les objectifs européens pour l’énergie et le climat à l’horizons 2050. Cet objectif est appelé en France « facteur 4 » car il implique une division par 4 de nos émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2050 par rapport à 1990, tout secteur confondu.

En France, le secteur résidentiel-tertiaire est le second poste d’émission de GES (20 %) avec environ 60% de ces émissions qui sont dues au chauffage. Pour résoudre cette équation, deux solutions s’offrent à nous : -(a) améliorer les performances thermiques des bâtiments et -(b) passer sur des modes de chauffage peu carbonés (bois énergie, solaire thermique, géothermie…).

Un article qui tombe à pic car la convention citoyenne pour le climat vient récemment de dévoiler 150 propositions pour lutter contre le réchauffement climatique et qui pourrait devenir dans les prochains mois une proposition de loi : parmi elles figurent -(a) l’obligation pour les propriétaires occupants et bailleurs de rénover thermiquement leurs biens et -(b) d’interdire les chaudières au fioul et au charbon d’ici à 2030.

Intéressons-nous à la première des solutions et plus particulièrement à la rentabilité économique des différents gestes améliorant les performances thermiques des bâtiments. Ces données sont issues d’une conférence d’une heure donnée par Jean Marc Jancovici au Collège de France en 2017.

Pour expliquer le graphique suivant, tiré de la conférence précédemment mentionnée, prenons un exemple pratique : Je souhaite investir dans mon logement en isolant de quelque manière que ce soit :

€ CAPEX : dépenses en capital (operational expenditure en anglais) ; MI : maison individuelle ; LC : logement collectif.

Revenons donc au graphique. La rentabilité intrinsèque des gestes d’isolation qu’on vient de calculer dans notre exemple correspond à l’ordonnée du graphique, intitulée (€ CAPEX/kWh évité). Il est donné pour 6 gestes d’amélioration des performances thermiques d’un logement :

Le changement des menuiseries (fenêtre) n’est JAMAIS rentable, peu importe l’énergie utilisée pour se chauffer, et pourtant il représente le premier poste d’intervention sur le bâti en France nous rappelle Michaëlle Rabiller, formatrice ASDER, dans le MOOC « rénovation performante ». Elle ajoute que ce geste est effectivement important pour améliorer l’étanchéité à l’air du bâtiment, le confort thermique des occupants, supprimer les sensations de parois froides et d’inconfort phonique mais le changement des menuiseries ne représente que 10 à 15 % de déperditions thermiques d’un logement.

Effectivement, remarquons sur le graphique ci-haut (courbe des abscisses : gisement d’économie d’énergie) que le changement de fenêtres et l’isolation de la toiture sous rampant au passage, sont les deux gestes dont le gisement d’économie d’énergie est le plus faible. Les gestes qui permettent le plus d’impacter sur les économies d’énergie sont dans l’ordre : les combles, le plancher, ITE, ITI.

Ce cas de figure nous montre aussi qu’il y a deux manières législatives pour que l’économie aille vers une augmentation de la performance thermique des bâtiments :

Une autre manière consisterait à pénaliser fiscalement les logements les plus énergivores en augmentant la taxe d’habitation de ces logements ou même mieux en augmentant la taxe foncière pour impliquer directement le propriétaire.

Et que dit la loi : d’ici à 2050 ? Facile !! Avec la réglementation thermique en vigueur et celle qui va être mise en place d’ici à 2021 l’objectif sera atteint. Ce n’est pas si simple, car la réglementation thermique ne s’applique qu’au neuf. Par ailleurs le taux d’accroissement du parc immobilier est de 1 pour 100 et le taux de renouvellement du parc n’est que de 1 pour 1000. Ces taux aussi faibles impliquent que d’ici à 2050 dans un business « as usual », 75 % du parc sera constitué de bâtiments non rénovés et ne respectant pas une réglementation thermique adaptée. Ils représenteront encore 90 % des émissions de gaz à effet de serre du parc immobilier français.

L’objectif : le parc résidentiel Français c’est 30 millions de logements à rénover d’ici à 2050 donc en 30 an. Il faut rénover 1 million de logement par an en commençant par les plus énergivores.

Et aujourd’hui ?

Entre 2020 (aujourd’hui) et 2030 l’Etat prévoit de rénover seulement 540 000 logements par an mais en réalise beaucoup moins. Les mesures ne sont pas à la hauteur des enjeux et pourtant un engagement fort dans ce secteur permettrait « d’éradiquer » la précarité énergétique chez les familles les moins aisées et de créer plus de 200 000 emplois non délocalisables. Au-delà du pari énergétique c’est un enjeu social et économique qu’il faut relever.

Si vous êtes un particulier aux revenues modestes, les combles et les planchers semblent être les postes les plus rentables économiquement. Les fenêtres, représentent un faible poste de déperditions thermiques mais apportent d’autres avantages non négligeables : confort acoustique, étanchéité à l’air, disparition du phénomène de parois froide. Mais cette solution technique reste néanmoins cher et n’est pas rentable économiquement.


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